à M. le Directeur de la Rédaction de La Provence
copie à M. le Rédacteur en chef édition Marseille
copie à M. le Rédacteur en chef éditions régionales
A Rustrel, le 27/04/2011
Objet : droit de réponse
Monsieur,
J’ai lu avec intérêt l’article de votre correspondant en Israel, Matthias INBAR, paru dans votre édition AVIGNON du 26/04/2011 en page IV sous le titre « LA MER MORTE MERVEILLE DE LA NATURE ».
J’ai été fort surprise des erreurs fondamentales figurant dans cet article. Je vous demande donc de bien vouloir faire paraître dans votre journal le droit de réponse et rectificatif ci-après :
J’ai effectué en novembre 2009 un reportage sur les rives de la Mer Morte, que j’ai explorées du Nord au Sud de façon approfondie, je pense donc connaître suffisamment cette région pour me permettre d’en parler.
Dans son article, M. INBAR, qui n’a sans doute examiné aucune carte politique d’Israel-Palestine, affirme : « à moins de 25 minutes à l’Est de Jérusalem ... nous sommes alors côté israélien ». Première contre-vérité flagrante : à 25 mn à l’Est de Jérusalem (par la route N°1), nous sommes en Territoire Palestinien, non en Israel ! La nuance est de taille : la grosse moitié Nord du littoral de la Mer Morte fait partie du Territoire Palestinien. La ligne verte (« frontière » entre Israel et Palestine fixée par l’ONU) passe un peu au Nord d’Ein Gedi.
C’est dans cette zone Nord (et plus précisément à Kaliya) que sont extraits les fameuses boues et minéraux, utilisés dans la confection des produits Ahava.
La société Ahava pille allègrement les ressources naturelles palestiniennes sans permission et sans compensation. Ce qui n’empêche pas M. INBAR de lui faire une publicité enthousiaste : « la société a intégré les données sociales de la région (!!!) et a nommé un Palestinien ... à la tête du département des ventes de l’agence située sur la rive israélienne ». J’ai visité cette agence, son luxueux magasin d’exposition ainsi que l’usine de fabrication : je peux témoigner que l’ensemble se situe à Mitzpe Shalem, en plein Territoire Palestinien.
Et M. INBAR de conclure : « un exemple de cohabitation qui aurait pu être parfait (!!!) si les responsables palestiniens n’avaient pas décidé d’interdire la vente des produits à Jéricho. Qu’importe, ce projet force le respect. ». Cynisme ou inculture crasse ? M. INBAR , « journaliste », ignore-t’il ou fait-il semblant d’ignorer que les colonies de Kaliya et de Mitzpe Shalem, qui détiennent 44% des parts d’Ahava, sont illégales au regard du Droit International :
4e Convention de Genève (art. 49, p. 6) : il est illégal pour la puissance occupante d’établir des colonies ou des infrastructures coloniales dans les territoires qu’elle occupe.
Résolutions 3005 et 3336 de l’Assemblée générale des Nations unies et 4e Convention de Genève (art. 33, p. 2) : il est interdit à la puissance occupante d’exploiter les ressources naturelles de la nation ou des territoires occupés.
Ensuite, bien que ses produits soient fabriqués dans son usine en Palestine et que les ressources soient extraites du Territoire Palestinien, Ahava indique que ses produits proviennent de « la mer Morte, Israël ». Cela constitue, au regard du Droit français, une « fraude à l’étiquetage », réprimée par les articles L 121-1 et suivants du code de la consommation. L’étiquetage trompeur empêche aussi les consommateurs français de faire des choix de consommation éthiques et éclairés.
Enfin, en étiquetant ses produits fabriqués en Palestine comme étant des marchandises d’Israël, Ahava évite de payer des taxes et frais de douane, grâce à l’accord d’association Union Européenne-Israël, coûtant ainsi aux Européens des centaines de milliers d’euros en taxes impayées.
On ne s’étonnera pas, dans ces conditions, d’apprendre que pour toutes ces infractions, la société Ahava est au coeur d’une action en justice intentée en France contre son distributeur, la société Séphora.
Voilà donc la réalité cachée sous la situation idyllique décrite par M. INBAR dans son article. Devant une telle accumulation de contre-vérités, on est en droit de se demander si ce correspondant est vraiment journaliste. On est aussi en droit d’attendre que « La Provence », journal indépendant, ne se fasse pas complice d’une propagande coloniale.
Souhaitant vivement que vous fassiez paraître ce texte le plus rapidement possible (je reste à votre disposition pour tout autre renseignement si vous le souhaitez), je vous prie d’agréer, Monsieur, mes salutations distinguées.
Jenny PRAGER
Présidente de l’Association France-Palestine Solidarité Vaucluse